Et encore 10 ! lecteur et lectrices ce jeudi dans la salle du conseil de l’Ancienne Mairie, avec : Véronique, Michèle, Françoise, Annick, Marie, Marie-France, Josiane, Yveline, Isaline, Vincent. Et Clo par procuration texto… (donc 11 !)

Une petite introduction d’abord en poésie, quelques petites précisions quant à ce qu’elle représente réellement, quelques poèmes lus des Feuilles de Poémier éditées par le Cénacle du Douayeul, dont un texte de George Sand « A Aurore » ou « Miroir » de Gabriel Brossi.
Ainsi qu’un texte de Claude Uroy, écrivain poète et de théâtre, a été lu par Annick : « Il y a dans chacune de mes nuits, une éternité, absolument parfaite, celle dont j’ai rêvé, mais qui disparaît, dès que je me réveille »…
Puis extrait de « L’âme au diable » le collectif-revue des Côtes d’Armor, nous avons été enthousiasmés par Alain Emery avec un très beau texte sur la disparition, où le thème du diable était très présent. On se laisse emporter dans ces lignes comme des vagues de douceur et de sérénité.
« Ciao, Sofia, qu’est-ce que je te sers ? Comme d’habitude ? Et j’ajoute un cornetto, parce qu’il faut manger, ma fille !
– Oui, merci, Maria. »
Je m’installe en terrasse, face à la mer, comme chaque matin depuis que je suis de retour en Italie. J’aime bien travailler au son des tasses qui s’entrechoquent. Et, au Mamma Maria, j’ai toujours de la compagnie. Il y a ceux qui viennent tuer le temps. Il y a les enfants qui rêvent devant le comptoir à glaces. Il y a les ados qui sirotent un soda, monsieur le curé, et, surtout, mes partenaires de scopa.
Ici, on vient échanger quelques mots, partager un apéro, esquiver la solitude ou écouter Celentano. Moi, je viens pour me persuader que j’ai bien fait de quitter Paris… et l’autre abruti.
Il fait quand même meilleur ici. Et puis, on cherche aussi à profiter de la bonne humeur (ou non) de Maria, qui mène, comme une mamma, tout ce petit monde à la baguette. Bref, j’ai enfin retrouvé mon village paisible. Enfin, paisible jusqu’au jour où…
2ème lecture. Exubérant, drolatique et terriblement intelligent, « Quichotte » est une bombe littéraire sur fond d’apocalypse. Une écriture difficile, intellectuelle, peut-être à déchiffrer dans la sous-texte, à consommer avec modération pour bien digérer les lignes de fond, une 3ème lecture sera donc nécessaire pour la semaine prochaine.
Puis une rupture amoureuse, derniers ébats. Lorsqu’il y a rupture entre deux êtres, qui se sépare réellement de qui ? Qui souffre le plus ? Celui qui prend la décision ou celui qui la subit ? Si l’on en croit le dernier roman de Jean-Philippe Toussaint, celui qui choisit de partir a la plus mauvaise place. Ici, c’est le narrateur qui est à l’initiative de la séparation. Il quitte Marie, une belle femme de la haute couture. Tous les deux sont à Tokyo. Dans un hôtel de luxe, ils vivent leur dernière nuit d’amour. Et il pleut comme il pleuvra sur tout le texte. Comment une dernière nuit d’amour peut-elle se vivre sans mélancolie ? À Marie, il ne reste que la pureté des larmes. Au narrateur, il reste une bouteille d’acide chlorhydrique qu’il promène sur lui, avec lui, qu’il sort de temps à autre pour se rappeler les ravages de la rupture. N’est-ce pas dans ses yeux, dans son propre regard, que cet acide devrait finir ? Une histoire simple. Efficace. Un texte où chacun peut revivre ses derniers moments avec un autre. Pas la guerre !
V. vient d’apprendre que l’on a retrouvé le corps sans vie de sa mère dans le ressac des vagues d’une plage non loin de la maison familiale. Elle quitte brusquement Montréal, direction la Gaspésie, terre natale, où elle retrouve sa soeur et sa tante, les « survivantes » de sa mère, cette femme fragile, instable, sauvage, qui a laissé une marque indélébile sur ses filles. En faisant le tri dans les affaires de la défunte, V. découvre de vieux cahiers contenant les journaux manuscrits de sa grand-mère qu’elle commence à lire puis bientôt à dévorer. Elle remonte le cours des femmes-fleuve de sa lignée.
Les Falaises fait le récit d’un voyage intérieur, historique et féminin, qui de la Gaspésie à l’Islande réunit ces femmes d’aventures et de grand air. Un roman de belle facture !
Dans une grande ville d’un pays en guerre, un spécialiste de l’interrogatoire accomplit chaque jour son implacable office. La nuit, le colonel ne dort pas. Une armée de fantômes, ses victimes, a pris possession de ses songes. Dehors, il pleut sans cesse. La Ville et les hommes se confondent dans un paysage brouillé, un peu comme un rêve – ou un cauchemar. Des ombres se tutoient, trois hommes en perdition se répondent. Le colonel, tortionnaire torturé. L’ordonnance, en silence et en retrait. Et, dans un grand palais vide, un général qui devient fou. Le colonel ne dort pas est un livre d’une grande force. Un roman étrange et beau sur la guerre et ce qu’elle fait aux hommes. On pense au Désert des Tartares de Dino Buzzati dans cette guerre qui est là mais ne vient pas, ou ne vient plus – à l’ennemi invisible et la vacuité des ordres. Mais aussi aux Quatre soldats de Hubert Mingarelli. On a beaucoup de difficultés à s’y retrouver mais le travail littéraire est remarquable de la part d’une écrivaine, une écriture que l’on jugerait masculine pourtant.

C’est une suite de lettres entre amis qui se sauvent la vie. Dans ce roman épistolaire, Virginie Despentes revient sur le thème qui unit tous ses livres – comment l’amitié peut naître entre personnes qui n’ont à priori rien à faire ensemble. Pour en « finir » avec ce Cher Connard, nous dirions que ce livre, qui n’est pas de la littérature, ouvre les yeux sur des milieux glaçants et immoraux, où les dérives entraînent le déséquilibre et la perte de l’amour vrai, la vérité n’est pas toujours bonne à dire, mais voilà ça se passe comme ça dans les milieux parisiens de tous poils artistiques. Merci Virginie !

Les ouvrages ayant fait l’objet de nos études ce jour :

« L’âme au diable » revue collective – extrait du texte de Alain EMERY
« Mamma Maria » de Serena GULIANO
« Quichotte » de Salman RUSHDIE (2ème lecture)
« Faire l’amour » de Jean-Philippe TOUSSAINT
« Les falaises » de Virginie DECHAMPLAIN
« Le colonel ne dort pas » de Emilienne MALFATTO
« Cher Connard » de Virginie DESPENTES (suite et fin – le livre a été photographié semaine dernière n’est pas sur celle d’aujourd’hui
Revue de presse : Annie ERNAUX – prix Nobel – controversée, son message politique engagé actuel a eu le dessus sur la littérature. Dommage ! mais tant mieux pour elle !)

Notre prochain rendez-vous est fixé au jeudi 20 octobre 2022, à 15 h à la Salle du conseil de l’Ancienne mairie.